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ÉDITEURS
J’en ai donc connu des très bons et j’y suis resté, des moins bons et j’en suis parti, des très vilains et je n’y suis jamais allé. Mais éditeur, dit comme ça, de toute façon, ça n’existe pas. Une maison d’édition, c’est un ensemble de personnes très humaines avec qui on fait un bout de chemin, ou parfois une vie entière. C’est une affaire de confiance mutuelle, de respect partagé pour le travail de chacun, de complicité intellectuelle avec un directeur de collection, une attachée de presse, un directeur artistique, un secrétariat éditorial, tant d’autres gens qu’on a plaisir à voir (ou auxquels on redoute de téléphoner : auquel cas, basta, la vie est trop courte pour s’emmerder quand on a choisi de faire un travail non-bureaucratique). Quant au fait, puisque vous me le demandez, que je ne sois pas moi-même devenu éditeur — ou directeur littéraire, ou dieu sait quoi — il faut y voir quelque chose que j’ai mis du temps à comprendre : j’ai horreur de recevoir des ordres, mais tout aussi horreur d’en donner ; je n’aime pas travailler sur commande mais je n’aime pas davantage commander du travail à des gens ; auteur je suis, auteur je reste, je ne tiens nullement à surplomber d’autres auteurs, pauvres (mais fiers) scribouillards tout comme moi. Cela posé, j’ai lu un nombre considérable de manuscrits dans ma vie, reçu un nombre tout aussi élevé de dessinateurs, dirigé d’innombrables mémoires universitaires, conseillé des gosses, des ados, des étudiants, participé à toutes sortes de projets collectifs : là, aucun problème, il s’agit de transmission du savoir, éventuellement d’autorité professionnelle, sans enjeux hiérarchiques ou financiers.